Scoop édito : À qui profite l’assassinat de Me Monferrier Dorval ?
Les crimes abjects ne nous sont pas allogènes. Elles sont nombreuses dans notre histoire contemporaine, les personnalités notoires haïtiennes, s’engageant pour la justice, la démocratie en Haïti, la transformation de la société, qui ont connu le même sort que Me Monferrier Dorval.
Quand le PDG de la Radio Haïti inter, Jean Léopold Dominique, a été assassiné, le trois (3) avril 2000, nous avions été tous secoués. La société haïtienne était frappée dans l’âme quand le journaliste/poète, Jacques Roche, avait été retrouvé mort le 15 juillet 2005. Des vils forfaits nous ont déjà surpris par le passé, mais nous ne sommes jamais autant sidérés. Nous sommes plus que stupéfiés par le meurtre honteux de Me Monferrier Dorval.
Jamais, on n’aurait pu imaginer une mort aussi écrasante pour un gourou de la justice haïtienne. Me Monferrier Dorval mettait en avant les intérêts de la nation. Il n’avait, à aucun moment de la durée, exprimé publiquement une position de camp et de clan. Nous saluons le départ d’un équilibriste/structuraliste. Le légiste abordait en profondeur les problèmes qui tracassent la société haïtienne.
Doté d’un grand sens d’ouverture, Monferrier Dorval s’entretenait aussi bien avec des figures de l’opposition que du pouvoir. Depuis l’annonce de son assassinat, dans la nuit du vendredi 28 août dernier, les rumeurs vont bon train sur les réseaux.
Certains disent qu’il a été assassiné par le pouvoir pour son statut d’avocat du Groupe Sogener poursuivi par l’État haïtien pour surfacturation dans des contrats de production d’énergie électrique liant les deux parties. L’assassinat de Monsieur Dorval avantage-t-il le pouvoir ?
D’autres affirment que son exécution dans ce contexte de l’insécurité qui règne dans le pays provient des acteurs de l’opposition visant à soulever la colère de la population contre le pouvoir. La tuerie du professeur arrangera-t-il l’opposition ? À qui profite son meurtre ?
Il revient à la justice haïtienne de faire la lumière sur ce crime ignoble. Avec le gaspillage du juriste haïtien de renommé international, la société pleure la perte d’une grande âme. Après la destruction de l’un des rares docteurs en droit constitutionnel en Haïti, la population est droit de se révolter.
Le pays est loin d’être dans une bonne dynamique. Le climat est épouvantable. En moins de 48 heures, de jeudi à vendredi soir, quatre personnalités ont été fusillées dans la capitale haïtienne, parmi lesquelles figurent un homme d’affaires et un présentateur de la télévision. Assassiné dans un contexte d’insécurité, Me Monferrier Dorval ne nous semble pas avoir été emporté par la machine de l’insécurité. La fusillade du feu bâtonnier de l’ordre des avocats de Port-au-Prince, sur la cour de sa résidence privée, dans le quartier présidentiel, a été une attaque ciblée.
Avant sa mort, Me Monferrier Dorval était favorable à une réforme constitutionnelle en Haïti. Mais, il croyait que cette réforme n’était pas possible pour le moment. Professeur Dorval a fait savoir au chef de l’État que le pays est ingouvernable avec la constitution en vigueur. S’exprimant pour l’amendement de la loi mère de la nation, le constitutionnaliste ne cachait pas sa position contre la question des élections initiées dans ce climat de l’insécurité par le pouvoir.
Mozard Lombard,
Éditorialiste chez la Radio Télé Scoop,
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