Haïti est le seul pays où les descendants d’esclaves ont payé des réparations aux héritiers de leurs anciens maîtres, déclare un journaliste du New York Times
Haïti n’est pas pauvre, mais est appauvrie. On le répétait. On le répète encore aujourd’hui avec raison. Les historiens le disaient. Les économistes le ressassaient. Des chercheurs le reprennent cette semaine dans une série d’articles scientifiques publiée dans les colonnes du New York Times.
Dans un article rendu public le 25 mai 2022 mis à jour le 26 mai, le journaliste chercheur, Constant Méheut, dénonce la France dans le sous-développement d’Haïti.
En 1825, écrit le journaliste du New York Times, Haïti a été contraint de payer des millions de francs français à la France en échange de la reconnaissance par ce pays de sa souveraineté. Ces paiements, et un prêt pour les couvrir, sont devenus connus sous le nom de « double dette ». Haïti est le seul pays où les descendants d’esclaves ont payé des réparations aux héritiers de leurs anciens maîtres – et ils l’ont fait pendant des générations.
Constant Méheut a fait cette déclaration, suite à son travail de recherche visant à faire le point sur les conséquences de la double dette dans le malheur d’Haïti. Le défi, explique-t-il, dans son travail de recherche, est alors devenu de comprendre comment le versement de 112 millions de francs sur des décennies avait affecté Haïti, et quel type de perte pour son développement économique ce versement représentait au fil du temps. Une façon de le faire était de déterminer combien cet argent vaudrait aujourd’hui s’il était resté en Haïti.
« J’ai supposé que si cet argent était resté dans l’économie haïtienne, il aurait, au minimum, augmenté à un taux de rendement égal à la croissance réelle du produit intérieur brut d’Haïti entre 1825 et aujourd’hui », a-t-il fait savoir, avant d’indiquer que j’ai constaté que la double dette aurait pu ajouter 21 milliards de dollars à Haïti au fil du temps.
En effet, dit le journaliste du New York Times, si l’argent était resté en Haïti, il aurait pu être investi dans des ponts, des écoles et des hôpitaux – des investissements qui rapportent à long terme et stimulent la croissance d’un pays.
Conscient du poids de la double dette dans le sous-développement d’Haïti, l’ex président, haïtien Jean Bertrand Aristide, avait demandé réparation en 2003. Cette demande lui a coûté les yeux de la tête. Il s’est rapidement retrouvé évincé du pouvoir, rappellent Constant Méheut, Catherine Porter, Selam Gebrekidan et Matt Apuzzo, dans un autre article publié le 20 mai dernier, intitulé « Comment la France a riposté aux demandes de réparation d’Haïti ».
« Mais en ce 7 avril 2003, le président haïtien vient soudainement de demander des réparations financières à la France. L’annonce est une déflagration qui deviendra la pierre angulaire de son mandat — et participera à sa chute, de l’aveu même de diplomates », a consigné l’article.
Mozard Lombard,
Éditorialiste chez Radio Télé Scoop,
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