Oraison funèbre de la dame Marie Gracia Justin, la maman de Gary Pierre-Paul Charles, PDG de Scoop FM et de Scoop TV.
Marie Gracia Justin s’est éteinte dans la nuit du 2 au 3 septembre 2017. Ses funérailles ont été chantées le samedi 9 du même mois au Parc du Souvenir. Plusieurs personnalités haïtiennes dont le président Jovenel Moïse et son épouse étaient venues saluer la famille éplorée. D’autres, plus nombreuses, ont assisté à la cérémonie du début jusqu’à la mise au sépulcre.
Par Idson Saint-Fleur
Il m’est douloureux, de vous entretenir sur la vie de celle dont la mort nous réunit, ici, ce matin : Marie Gracia Justin, Lormenta pour les plus proches.
Il m’est douloureux de dire à certains et de rappeler à d’autres comment cette femme forte suivant les vues classiques de l’ethnologie africaine a vécu en harmonie avec les siens tout en leur imposant un respect, à la limite, religieux. Non pas, parce qu’elle était d’un caractère trop austère, ô non ! Mais, ce faisant, les gens ont préféré lui retourner sa bonté, sa bienveillance et sa mansuétude d’une manière estimable étant donné qu’elle était un bon alliage de douceur et de respect.
Marie Gracia Justin dite Lormenta a vu le jour le 11 juin 1944 dans la localité de Fond-d’Oie, dans les hauteurs de Léogane. Elle est partie pour l’au-delà dans la nuit du samedi 2 au dimanche 3 septembre dernier. Elle avait 73 ans accomplis et était la seule survivante d’une famille de 4 enfants.
Madame Justin dite Lormenta dont la mort nous réunit ce matin était une femme sociale, une personne de communauté. Dans son quartier de résidence à Carrefour-Feuilles, elle a vécu suivant une tradition ancestrale haïtienne. Elle était la grand-mère des tout-petits, la mère des jeunes et la commère des gens de son âge. Elle a œuvré à l’éducation de plus d’une dizaine de filles, des nièces et des cousines qui étaient pour elle la consolation de n’avoir donné naissance à des filles
Lormenta était une travailleuse. Elle croyait dans la réussite par le travail. Elle pouvait s’occuper, à elle seule, du labeur abandonné par une centaine d’autres. Cette conception du travail, base de toute réussite, sociale, économique, intellectuelle, elle l’a soigneusement inculquée à ces deux enfants, Gary et Degaulle, et déjà par petites notes, à ces petits-enfants.
L’amour du travail, du travail bien fait, était l’une de ses belles qualités. Est-ce pourquoi, cette femme au tempérament trempé, s’était battue pour réussir l’éducation de ces deux garçons. Subtilement, elle a tissé entre eux l’essence d’une fraternité inaltérable. Gary est le grand frère de Degaulle ; Degaulle est le filleul de Gary.
Celle dont le départ nous afflige ce matin était vive d’esprit. Elle était alerte. Elle avait un œil sur tout ce qui faisait dans son environnement immédiat et une oreille assez attentive pour capter les moindres paroles ou cris plaintifs.
Elle n’était pas du genre à délaisser la responsabilité de sa maison. Comme un bon timonier, son regard perçant lui permettait de percevoir à dix mille lieues à la ronde les récifs qui pouvaient mettre en danger son voilier. L’allégorie, dans la réalité, pouvait ne pas coller suivant cette considération qu’il n’est jamais donné aux femmes haïtiennes d’exercer le métier de marin. Néanmoins, si nous considérons son rôle de chef de ménage, si nous considérons la vie de chacun de nous comme un esquif, il faut admettre que la sienne, aussi bien celle de ces enfants, elle a tout fait pour les protéger des vents les plus impétueux lesquels n’ont pas de saison dans ce pays.
Je fais mention de cette douleur que nous ressentons tous, mais il est opportun de parler de la joie de Lormenta. La joie d’avoir lutté pour le bien-être de sa famille ; la joie d’avoir protégé, grâce à sa droiture, son dévouement et son affection, ses enfants de tous les tourbillons sociaux qui auraient pu les assommer ; la joie d’avoir été bienveillante jusque dans les limites du « l’humainement supportable » ; la joie d’avoir été courtoise et altruiste envers les gens de sa connaissance. Elle avait cette joie communicative à laquelle elle nous soumettait dès le premier bonjour. Son sourire était contagieux ; son rire éclatant. Un héritage socio-affectif qu’il a transmis aussi à Gary qu’à Degaulle, mais davantage au premier.
L’émotion de Gary derrière le micro, la vivacité de son discours qui vous retient accrochés à son émission, tout cela vient en grande partie de sa mère. Sa Facon de vous parler familièrement pour la première fois comme si on se connaissait depuis des lustres, son affabilité ; tout cela lui a été transmis, en grande partie, par sa mère.
Je peux en dire autant pour Degaulle, l’un des trois complices de Gary à l’émission Haïti-Débat. Suivant le ton de l’émission du jour, instinctivement Degaulle choisit les musiques appropriées. Cette spontanéité dans l’action – ce que d’autres appellent reflexe ou automatisme – Charles Degaulle l’a intériorisée durant des années au regard de l’agir de sa mère.
Je voudrais bien, mais il est impossible de vous dire davantage de la mémoire de cette bonne mère, Marie Gracia Justin que tout le monde appelle Lormenta ; une mémoire qui nous est chère. Une mère que nous aimerions garder avec nous des années encore.
Mais, vous savez que les desseins de Dieu sont insondables. Le Grand Maître fait appel à ses enfants quand il le veut. Personne ne peut s’y opposer. Personne ne peut remettre en question sa volonté. Même la science des médecins n’a pas réussi à prolonger les jours de notre bien-aimée qui vivait sa foi chrétienne dans la sérénité et l’amour du prochain. Son heure H avait sonné. Personne ne pouvait la retenir une minute de plus. Tout cela s’est passé suivant le plan impénétrable de la Providence
Aux enfants, petits-enfants, parents et amis de la disparue, que le Bon Dieu donne le courage de traverser ce cap avec foi et philosophie.
Adieu Marie Gracia Justin !
Adieu Lormenta !