Haïti débat / Les causes de l’insécurité dans le pays : La poursuite des bandits est-elle le seul et unique moyen pour résoudre le problème de l’insécurité ?
De jour en jour le coût de la vie devient de plus en plus élevé. Le taux d’inflation ne cesse de grimper. La situation de chômage a atteint son paroxysme. La population vivote dans des conditions faméliques. La seule carte que peut jouer la population pour se défendre, c’est le commerce informel. Cette situation a réduit toutes les artères du pays à des marchés publics. Haïti est devenu une République de marchés.
Le phénomène de marchand ambulant se développe de manière spectaculaire. Pour combattre la misère, nos petits commerçants se promènent, à longueur de journée, entre autres, avec une poche de cigarette, un éventaire de pistache, de sucette sur les bras.
Ne pouvant plus tenir, une frange de la jeunesse haïtienne, livrée à elle-même, s’adonne au banditisme. Le gangstérisme devient aujourd’hui dans le pays, non seulement un moyen de se monnayer, mais aussi, un outil de promotion sociale. Nos bandits sont, de loin, plus populaires, ces jours-ci, que nos intellectuels, nos élus, voire même nos artistes.
Nous ne sommes pas des anges. Nous ne sommes pas des anthropophages. Si les anthropophages se nourrissent naturellement de la chaire de leur propre espèce, il n’est pas dans la nature de l’homme de se manger. Aucun être humain ne peut résister à la famine de manière sempiternelle. Il arrivera un temps où l’on se dénature. Pas trop longtemps de cela, un vidéo montrant un groupe de bandits en train de manger de la chaire calcinée d’un haïtien, tournait en boucle sur les réseaux sociaux. Si le pays continue de vivre dans cette situation de grande famine dans laquelle il est actuellement, nous deviendrons des anthropophages.
La situation de famine est inadmissible. Il y a une trop grande disparité sociale dans le pays. Le chômage est trop élevé. Le problème de l’insécurité ne sera jamais résolu, tant que nous tolérons l’injustice sociale. Nous avons besoins, non pas de l’injustice, mais de la justice sociale. C’est exactement l’injustice sociale qui conduit à l’insécurité. Il n’est pas anormal d’avoir une inégalité sociale autant élevée dans le pays.
L’insécurité qui traverse le pays ne concerne pas seulement le pouvoir. Elle concerne toute la société. Elle est aussi l’affaire de l’opposition dite démocratique et populaire. Tout le monde peut en être victime. « Si on n’aborde pas le problème comme on devrait l’aborder, les zones paisibles deviendront aussi des régions de non droits », avise Présimon Jean, lors de la retransmission de l’émission Haïti débat du mardi 30 avril 2019.
Insistant sur les problèmes sociaux, l’analyste politique invite à ses concitoyens à ne pas célébrer la mort d’un bandit. Selon lui, après l’exécution du chef de gang TIJE, il y en aura d’autres à Savane Pistache. « On ne pourra pas résoudre cette insécurité avec autant de personnes au chômage dans le pays », nous dit-il.
« Si on n’agit pas sur les inégalités, le problème de l’insécurité ne sera jamais résolu. Chaque groupe qui constitue la société à son rôle à jouer. L’insécurité alimentaire génère de l’insécurité publique », explique le politologue Ené Val, soulignant que si toutes les forces de la société ne s’assoient pas ensemble pour que tout le monde ait un minimum, nous serons tous perdants.
À ceux qu’on offre les armes, le juriste, Campane Joseph, leur demande de faire attention. « Les armes qu’on vous offre aujourd’hui, retourneront contre vous », prévient-il aux bandits manipulés, avant d’enchainer que ce que doivent comprendre les haïtiens, le pays nous appartient. Il ne revient qu’à nous de le changer.
Mozard Lombard,
Communicateur Social, Journaliste,
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