Haïti débat / Jovenel Moise et ses alliés : La présidence perd ses poils au profit de l’opposition
Les sympathisants de Jovenel Moise continuent de rebrousser chemin. Le navire de jour ne jour perd ses voyageurs. Après Youri Latortue et Sorel Jacinthe, c’est au tour de Joseph Lambert de faire machine arrière. Cette cascade de désolidarisation témoigne des malentendus entre le président et ses alliés. La présidence se déplume au profit de l’opposition.
Le sénateur du Sud Est, Joseph Lambert, dans le souci de monter un véritable gouvernement de cohabitation pour dénouer la crise permanente qui ronge le pays depuis plus d’un an, avait exprimé ses velléités auprès du chef de l’État pour briguer le poste de premier ministre de la République. Sa prétention a été accueillie favorablement au point qu’il pensait que l’obtention de cette charge allait comme une lettre à la poste. Au moment de faire le choix du nouveau PM, le président en a décidé autrement, sans le prévenir. Cette décision a complètement déçu le sénateur qui se croyait être son alter ego.
Joseph Lambert a annoncé, mercredi dernier, sa désolidarisation avec Jovenel Moise pour avoir fait l’objet de méfiance et pour le manque d’élégance du président qui, d’après lui, devait le mettre au courant bien avant la publication de l’arrêté nommant le premier ministre Fritz William Michel.
Le fait de se désolidariser avec quelqu’un n’aurait dû pas constituer en soi un problème. C’est un droit. Le problème peut être résidé dans la raison avancée. Après l’annonce de dissociation du parlementaire avec le chef de l’État, les réactions affluent. Pour beaucoup, le sénateur n’est pas parti en beauté. Il donne l’impression qu’il était en quête du portefeuille de la primature.
Le sénateur a informé aussi de sa passation dans l’opposition politique du pays. Il a précisé la nature de l’opposition qu’il voudrait. Cette dernière devrait être une opposition éclairée, constructive et positive. Cette déclaration indique implicitement que celle que l’on a présentement est de nature ténébreuse, destructive et négative. Ainsi, Monsieur Lambert entend la reconstruire.
Il faut dire que depuis la saga de l’ancien premier ministre Jean Henry Céant, Jovenel Moise est devenu méfiant envers les politiciens traditionnels, même ceux qui l’entourent. Jo Lambert est en quelque sorte victime de cette histoire. Le président ne souhaite pas revivre les mêmes événements.
Nous devons ajouter aussi que ce qui lui importe, ce n’est pas tant la résolution de la crise et le contenu de son mandat, mais de préférence la réalisation de son quinquennat. Tenant compte du capital politique et symbolique de l’ancien président du Grand Corps qui côtoie les acteurs depuis plus de trente ans, il aurait pu les approcher pour apaiser la tension.
Après cette mésaventure avec le président, Joseph Lambert affirme qu’il ne va pas voter en faveur du PM nommé Fritz William Michel malgré l’amitié qu’ils partagent entre eux. Cette affirmation est l’expression d’un règlement de compte. Elle n’a rien à voir avec le pays. Le sénateur privilégie son problème personnel que celui de la République.
Au regard de la situation actuelle, le pays a plus que besoin d’un gouvernement légitime. Aujourd’hui, nous avons une inflation écrasante qui dépasse le seuil de 18 %. Nous avons une rareté de carburant sur le marché haïtien. L’insécurité bat son plein. La gourde continue de se déprécier. Il nous faut de 95 gourdes pour un dollar américain. Le pouvoir d’achats de la population se diminue. Dans les mois à venir le parlement haïtien sera dysfonctionnel. Dans deux semaines les élèves vont rentrer à l’école. Le mandat du directeur général de la PNH arrive à son terme. Nous devons renouveler le Conseil d’Administration de la BRH. Le pays n’a pas de gouvernement légitime depuis tantôt six mois.
Mozard Lombard,
Journaliste/Rédacteur de la Radio Télé Scoop,
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